1390-1535 : le long quinzième siècle à Chassiers

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J’ai choisi ces deux dates pour définir l’intervalle à présenter dans ce chapitre, parce que leur présence souligne que l’Histoire entre alors dans une période où il est plus facile que auparavant d’affecter des coordonnées temporelles relativement précises aux événements locaux. Cette possibilité nouvelle reflète peut-être autre chose qu’une moindre ignorance de l’historien. Je l’interprète comme le signe que le monde rural d’alors (du moins le monde rural des midis) commence à acquérir des capacités de cadrage qu’il ne possédait pas auparavant. Ou qu’il ne possédait plus. Il est d’ailleurs bien possible que la présence de dynasties notariales au village ait beaucoup contribué à ce genre de précisions.


1396, nous le savons maintenant, est la date très probable du début de la construction ou de la reconstruction de l’église paroissiale, à propos de laquelle les précédents billets ont fait écho. 1535 correspond à un procès qui opposa les représentants de la communauté chassiéroise aux dissidents de Chalabrèges et de Tauriers qui eussent souhaiter, semble-t-il, pouvoir exploiter seuls certains terrains de leur quartier. J’y reviendrai, bien sûr.


Pour l’instant, je me contenterai de souligner déjà qu’à l’occasion de ce procès fut utilisée une expression remarquable : « Tauriers et Chalabrèges forment avec Chassiers un seul corps mystique ». Généralement employée pour désigner l’Église, cette expression me semble signaler qu’en dépit de l’aptitude du monde chassiérois à intégrer les réflexes intellectuels de la Renaissance débutante, ce monde reste très attaché – même sous François Ier – à une conception vitaliste, presque animiste, du réel.

Entre 1396 et 1535, c’est le long quinzième siècle : pour les historiens des Lumières, c’est celui qui voit émerger des obscurités moyenâgeuses une Renaissance toute neuve, encore ruisselante d’énergie printanière. Pour ce qui concerne le Moyen-Âge, les précédents chapitres ont essayé de recenser tout ce qui va (dans la documentation admise) à l’encontre de cette simplification. Mais il faut bien reconnaître qu’il est tentant, pour l’historien d’aujourd’hui, d’insister à son tour sur l’avènement de comportements nouveaux et surtout peut-être sur l’acceptation de la nouveauté comme signe non plus du diable mais du progrès.

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Même s’il convient comme toujours de se méfier de la médiocrité de nos informations directes sur Chassiers, il semble bien que la période 1400/1420 ait été ici assez calme, surtout si on la compare avec la poursuite des troubles dans une grande partie du Royaume. Le Roi Charles VI, en proie à des crises de démence, tente par instants de s’interposer dans le conflit multiforme qui oppose les Princes de son entourage et dresse l’un contre l’autre le clan des Armagnacs et celui des Bourguignons. Les Parisiens se révoltent. Les Anglais en profitent. Très loin de Chassiers, à Domrémy, un paysan aisé, plus ou moins consul de sa paroisse, fortifie son village contre les « routiers », tandis que Jehanne, sa fille, entend des voix l’inciter à « bouter l’Anglois hors du Royaume ».


Le calme relatif de Chassiers permet d’y achever les travaux de l’église, ce qui rassure et affermit les liens sociaux de la communauté. Celle-ci est soumise à l’autorité des évêques de Viviers, mais en ce début de quinzième siècle la prééminence épiscopale semble devenue théorique et la réalité du pouvoir local appartient maintenant aux co-seigneurs du chef-lieu : les Chalendar de la Motte et les La Vernade et ceux-ci semblent avoir trouvé avantage à laisser la roture s’organiser, sous contrôle, autour des familles les plus notables. Bien entendu, quand une décision importante est prise (le devis de l’église, l’affermage de la boucherie, le choix de nouveaux marguilliers puis de nouveaux consuls, par exemple), la caution des co-seigneurs est requise, mais nous n’avons pas de trace de conflit entre les seigneurs et les représentants de la communauté.

Il faut dire qu’en plus d’une certaine modération, deux facteurs (d’ailleurs probablement liés) ont pu jouer dans ce sens: vers 1400, les paysans de Chassiers sont nettement moins nombreux – et donc plus précieux – qu’un siècle auparavant (à quelques choses, malheurs sont bons !) et le servage (qui avait fait retour aux siècles précédents) est abandonné progressivement au fur et à mesure que les seigneurs maintiennent sur les « manses » les mêmes familles qui, moyennant une partie de leurs récoltes (les « censives »), peuvent à leur guise gérer un bien dont elles finissent par se considérer comme propriétaires.

Par ailleurs, la présence de nombreux prêtres au village mais aussi dans les écarts, ainsi que l’existence de notaires donnent à la communauté chassiéroise une allure moins paysanne que dans les villages des alentours. Les « illiterrés » sont moins nombreux, proportionnellement, à Chassiers qu’à Vinezac. En 1463, à Montcouquiol, Jean Lieutier, dans son testament, donne un muid de vin à l’ « Université de Chassiers » qui semble avoir été une sorte d’association professionnelle des prêtres du lieu, chargée de répartir entre ses adhérents les charges et les bénéfices liés aux sacrements. Au même moment, naît à la Rouvière Antoine Ladet qui deviendra prêtre à son tour et aura quelques démêlés avec la dite Université.

On notera aussi que cette communauté se relie, par l’intermédiaire de ses co-seigneurs, à toute l’administration royale de Villeneuve-de-Berg. Depuis la fin du treizième siècle (j’y ai fait allusion dans des billets antérieurs), le Roi de France dispose à Villeneuve-de-Berg d’un baillage ou sénéchaussée dont le lieutenant est le plus souvent un Chalendar de la Motte. Les retombées locales de cette situation deviendront particulièrement intéressantes à partir de 1453. À cette date, généralement considérée comme la fin de la « Guerre de Cent Ans », le Valois triomphe définitivement du Plantagenêt : Chassiers sera dirigé à partir de Paris, de Montpellier (ou de Toulouse) et de Villeneuve-de-Berg et non à partir de Londres et Bordeaux !

S’il est possible (et même probable) que l’entité chassiéroise correspond à cette communauté dans la tête des habitants, il faut bien comprendre que les limites territoriales n’en sont pas nettement définies et qu’elles ne correspondent pas exactement aux frontières de la commune actuelle. Des écarts comme Perbost (aujourd’hui sur Rocher) ou même Pugnères (aujourd’hui sur Joannas) peuvent avoir été inclus à l’intérieur de ce terroir. Pour l’historien d’aujourd’hui, les choses sont également compliquées par la disparité des découpages administratifs, religieux et judiciaires.

Par exemple, la communauté de Chassiers correspond à deux circonscriptions religieuses : la paroisse de Chassiers et la paroisse de Trebuols (ancien nom de Rocher). C’était encore vrai, il y a guère. Et cela semble avoir très tôt encouragé les habitants de Joux, la Rouvière, Fayssier ou Lutte à se sentir plus proches de Trebuols que de Chassiers. La relative complexité qui en résulte est encore aggravée (ou enrichie, car ce n’est pas forcément un mal!) par l’enchevêtrement des juridictions judiciaires dont les chevauchements permettent parfois aux justiciables de jouer la justice (civile) de l’évêque contre celle du seigneur ou la justice ecclésiastique contre la ou les justices laïques.

Sur le plan du fisc royal, la « taille » (l’impôt royal par excellence) se lève dans le cadre du « mandement ». Le mandement de Chassiers englobe non seulement le terroir de la communauté de Chassiers mais aussi Tauriers. Ses limites (qui doivent être précises, puisque la taille est un impôt de répartition dont la charge doit être divisée par le nombre exact de feux) sont ainsi définies en 1535 :
« (le) mandement (de Chassiers) grand, large, ample et spacieux, contenant plusieurs villages, confrontant du soleil levant le mandement de Vinezac, avec la rivière de Lende estant au milieu,, et avec le mandement aussi d’Uzer, ainsi que certains termes et limites le montrent ; du couchant, avec le mandement de Joannas, comprenant les lieux de Tauriers, Chalabrèges, Pugnères, les Mases avec leurs terroirs ; de la bise (cad du nord), avec les mandements de Prunet et de Chazals, comprenant les villages de Prévost (Perbosc), Joux, des Faysses, semblablement avec leurs terroirs ; et du vent marin et midy, avec les mandements de Sanilhac, Montréal et Chadeyron, ainsi qu’un ruisseau nommé Rieu Bren (le Roubreau) et la rivière de Ligne,…, comprenant semblablement en cet endroit le dit lieu et territoire de Tauriers entièrement… »

Ce passage fait partie du procès-verbal, rédigé en 1535 par le notaire Etienne Vincent à l’occasion d’une transaction sur laquelle je vais maintenant insister.

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Plus que d’un procès en bonne et due forme, il s’agit d’une transaction qui aboutit à une sorte de compromis, mais qui est entourée d’une certaine solennité étroitement inspirée du déroulement des procès. Nous sommes le 8 septembre 1535, sur la Place de Chassiers et « au devant de la maison des Carons ». Il est possible que cette maison de la Place soit une de celles dont la façade actuelle rappelle la Renaissance. Dans la mesure où le procès-verbal « fait et récité publiquement » a été rédigé par Estienne Vincent, notaire royal à Chassiers, et dans la mesure où les archives de celui-ci sont demeurées jusqu’à aujourd’hui dans la maison Payan/Soulerin/Lemblé, on peut facilement imaginer que le texte de la transaction a été lu à cet endroit.

De quoi s’agissait-il? Apparemment, de deux questions liées entre elles par la définition des limites du mandement de Chassiers : d’une part, les habitants des quartiers de Tauriers et de Chalabrèges continueraient-ils à prendre à leur charge le septième du prélèvement imposé par les Etats du Vivarais au mandement de Chassiers, au titre de la taille due pour les terres non nobles ? d’autre part, « les esplèches communes », c’est-à-dire, semble-t-il, les pâtures collectives (définitivement ou temporairement ?) du terroir englobé par le mandement de Chassiers continueraient-elles à être utilisées pour le bétail par l’ensemble des familles du mandement ?

Les représentants des habitants de Tauriers et de Chalabrèges semblent avoir poussé d’abord le bouchon fort loin puisqu’ils réclament en fait que soit reconnue l’autonomie d’un mandement de Tauriers extrait de celui de Chassiers ! En tout état de cause, cette requête était irrecevable, puisqu’elle mettait en question un découpage administratif qui relevait seulement du fisc royal. Ceux de Tauriers et de Chalabrèges ne pouvaient pas l’ignorer et je pense qu’ils ont avancé cette revendication pour en faire aboutir une autre, plus modérée. Et qui concerne « les esplèches communes ».

Puisque la distance (semblent-ils avoir dit) nous confère une sorte d’autonomie par rapport à Chassiers, au point que nous serions en droit de réclamer la création d’un mandement particulier, accordons-nous pour que les pâtures communes de nos quartiers (bord des chemins, terres après récoltes, éventuellement terres communautaires) nous soient réservées et interdites par conséquent aux « tels étrangers volans user et de fait abusans des dites esplèches dedans le dit mandement de Tauriers » !

Le fond de l’affaire est bien là. Si chacun peut venir pousser sa chèvre, ses brebis, son cochon, voire sa vache ou son âne sur nos « esplèches » communes, cela risque de multiplier les divagations animales qui ne tiennent pas compte de la distinction entre parcelles ouvertes à la communauté et parcelles restées privées. La transaction finale reconnaît d’ailleurs la validité de cette remarque puisqu’elle constate qu’en cas d’abus les habitants de Tauriers et de Chalabrèges peuvent faire appel à des juridictions différentes de celles qui concernent seulement Chassiers ! Ici, le texte fait une allusion difficilement compréhensible qui me semble suggérer que le terroir compris entre Ligne et Roubreau est soumis à un contrôle judiciaire différent de celui de Chassiers. Peut-être moins contrôlé qu’à Chassiers par l’évêque de Viviers? Le second point de la déclaration finale est ainsi rédigé : «  Item, tous les habitants, tant de Chassiers que de Tauriers, ont été de tout temps en possession et saisine, liberté, faculté et droit de user promiscuément de toutes esplèches communes tant dans la dite juridiction des évêques de Viviers que des seigneurs juridictionnels de Tauriers et Chalabrèges… »


Il n’est donc pas sûr que les plaignants de Tauriers et de Chalabrèges aient perdu au compromis que leurs représentants ont signé. Sachant qu’ils ne pouvaient guère espérer ne plus verser le septième de la taille de Chassiers ni, à plus forte raison, obtenir la création d’un nouveau mandement, ils se voient confirmés dans le droit de porter les conflits qui surgissaient à propos de l’usage des esplèches communes devant les « seigneurs juridictionnels » de Tauriers et de Chalabrèges et non devant l’évêque de Viviers. Il est probable qu’ils pouvaient attendre de cette possibilité au moins une instruction plus rapide (et peut-être plus compréhensive) de leurs affaires.

Cet accrochage entre Chassiers et Tauriers (et Chalabrèges !) a peut-être contribué aussi à orienter ces quartiers du mandement dans un sens opposé au choix de Chassiers au moment des conflits qui ne vont pas tarder à éclater pendant « les guerres de religion ». Tauriers sera parpaillot, Chassiers papiste et Chalabrèges disputé entre les deux camps. Mais nous n’en sommes pas encore là en 1535 : si Luther a déjà commencé son combat dans les états allemands, Calvin et ses idées et son organisation ne sont pas encore arrivés en Vivarais.

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Le premier « item » de la transaction de 1535 affirme clairement :
« Premièrement, (les signataires) déclarent que les habitants de Tauriers et Chalabrèges forment un mesme corps mystique avec ceux de Chassiers… ».

En face d’une telle expression, l’historien a le choix entre plusieurs attitudes.
Il peut ne pas s’y attarder, estimant avec quelque raison que le débat de 1535 ne porte pas sur des questions religieuses ou philosophiques mais bien sur des querelles liées à des divagations animales qu’on laisse plus ou moins aller ou qu’on tolère plus ou moins. Les notaires, consuls, exacteurs et témoins, mobilisés devant la maison des Cairons par l’affaire, ne sont pas des théologiens et si l’un d’entre eux propose la formule magique(sans doute le notaire royal), les autres l’acceptent comme allant de soi et signifiant platement que tout ce monde relève du mandement de Chassiers. Et chacun rentre chez soi.

Attentif quand même au fait que l’expression est reprise plusieurs fois et qu’elle est même, dans un certain passage, comme commentée (« … se sont efforcés se séparer et disjoindre de leur dit corps mystique… »), il peut aussi flairer la rumeur d’encens qui semble en émaner. Il se demandera alors s’il n’y aurait pas là quelque survivance encore bien active (même aujourd’hui!), quelque archaïsme fusionnel témoignant du maintien de l’obscurité médiévale au moment où la Renaissance se lève.

Il y aurait donc plusieurs « corps mystiques » ? Entre autres, celui du mandement de Chassiers au quinzième siècle… Autrement dit : le rapprochement entre l’expression « corps mystique » et son signifié (une bête circonscription administrative, le mandement) soulignerait à quel point, pour beaucoup de Chassiérois du quinzième siècle ou même du début du seizième, le monde qu’ils habitent (au sens le plus mystique du terme, le monde qu’ils hantent et qui les hante) se confond charnellement avec « le monde ». Ce qui implique une grande confiance et deux méfiances.

Le corps mystique de Chassiers est une contradiction dans les termes car si corps mystique il y a, il ne peut être qu’universel. Mais la contradiction n’est pas vécue comme telle : les Chassiérois d’alors s’intègrent totalement dans ce bout de terroir, dans ce « lieu ». Oui, un lieu plus qu’une partie du monde, un lieu, c’est-à-dire une terre qui relie tout ce qui semble vivre sur ou sous elle. Un lien. Un nœud. « L’infini silencieux noué sur soi ». Comme si (mais ce n’est pas comme si, c’est ainsi) l’univers se concentrait ici, à la fois présent dans son immensité (qu’à l’époque et pour longtemps encore on ne pensait pas infinie) et réduit à ce lieu si familier qu’on s’y sent parfois – par instants de bonheur – dans une confiance totale qui abolit les frontières entre les choses du monde, entre les choses et les êtres.

Mais les instants de bonheur ne durent pas (bien qu’ils l’exigent) et les Chassiérois ne veulent pas ignorer qu’ils doivent se méfier d’une double intrusion. Celle de l’étranger d’abord. Et l’étranger commence très tôt : à Tauriers par exemple. Et sur Tauriers, il peut venir de Chassiers ! Et il est ressenti comme une menace : même s’il vient à Chassiers « pour gendre » ou « pour bru », il risque de fragiliser les équilibres du lieu (ne serait-ce que sa venue s’accompagne souvent d’un échange de parcelles et d’usages) et il faudra toute une initiation pour qu’il s’intègre dans le corps mystique.

La transaction de 1535 révèle aussi un autre type d’intrusion dans le lieu. Il s’agit cette fois de cette étrangeté radicale constituée par ce que nous appellerions de nos jours la Loi. Celle-ci définit l’espace et la répartition des êtres à sa surface de manière fondamentalement étrangère aux liens qui font la solidité et la force de protection de la communauté : le mandement est une abstraction extraite, à la différence de la communauté, non pas de l’immanence du corps mystique mais d’une transcendance dont on ne comprend pas, ici, les motivations. La Loi est le monstre froid dont le glaive tranche à tort et à travers les liens de la communauté. D’où cet effort, un rien désespéré, pour l’humaniser en lui conférant un visage plus familier : l’évêque de Viviers est bien loin pour ça, alors que pour Tauriers ou Chalabrèges du moins les « seigneurs juridictionnels » qui tranchent des conflits du quotidien sont connus. Les sieurs de Brison ou de Montréal ou les Rochemure font partie -sauf leur respect – de Tauriers ou de Chalabrèges. Mais pas l’évêque de Viviers, même si, par extraordinaire, il est possible deux ou trois fois par siècle d’embrasser son anneau.

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Pour le début du seizième siècle,il est donc possible d’imaginer – tout en respectant ce que semble nous suggérer la documentation répertoriée – une véritable communauté chassiéroise, certes plus réduite que le territoire du « mandement de Chassiers », mais constituant une matrice pour les familles et les personnes qui s’y sentent chez elles. Quand les « marguilliers » de l’année (ou déjà, les consuls ?) sont choisis (dans l’église ou sur la Place) par les chefs de famille – sans doute une centaine de personnes – et en présence du curé et des représentants des La Vernade et des Chalendar de la Motte, on a le sentiment d’être entre soi et d’y avoir toujours été malgré les menaces qu’on attribue plus volontiers à l’extérieur qu’aux querelles intestines.

En 1529, dans des conditions que nous ne connaissons pas, cette communauté décide de se construire enfin une muraille qui, vaille que vaille, tiendra à peu près quatre siècles. Comme nous le verrons, cette muraille n’empêchera pas le sac du village pendant les Guerres de Religion, mais elle a pu avoir au moins le mérite, avec ses portes qu’on « barrait » le soir, de renforcer le sentiment d’intimité, fait à la fois de sécurité et de contrôle du groupe sur les éventuelles dissidences des individualités. La « première pierre » en fut posée par Mathieu de Chalendar, Guillaume de la Vernade et Claude de Chalendar-Cornilhon.

Cette dernière précision permet de poser la question des châteaux de Chassiers. À ma connaissance, aucune archive ne donne de précision sur la date de leur construction. Toutefois, il semble que la tradition familiale des Chalendar de la Motte considère que celui de cette dynastie remonte au quatorzième siècle. Il serait intéressant de savoir sur quoi s’appuie cette conviction. Qu’ils soient co-seigneurs de Chassiers donne de la consistance à celle-ci mais ne suffit pas à l’établir : comme les La Vernade, les Chalendar ont été successivement des notaires puis des agents de l’administration royale ; ce ne sont pas tellement, comme on dira plus tard, des « nobles d’épée ». Pour ma part, je continue à penser (et il me faudra peut-être, un jour, réviser ce point de vue !) que l’un et l’autre château, dans leurs parties les plus anciennes, ont pu apparaître (justement, plus comme édifice d’apparat que comme défense) dans ces moments de relative tranquillité où se construisent les murailles de Chassiers. Et nous sommes, aujourd’hui tellement habitués à les voir parties intégrées et intégrantes de Chassiers que nous avons tendance à les considérer comme aussi anciens que le village !

la tour de la Vernade


la tour du château de la Vernade, en haut du village, semble être la partie la plus ancienne de cet édifice : on peut y voir encore un très bel escalier de pierre, escalier à vis. (Cette image a été empruntée, et considérablement modifiée, au blog suivant, dont je salue l’auteure :Mouneluna

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