M point B tiret L

La nouvelle qui suit (et qui existe aussi, ICI, en version .pdf) a déjà été publiée, sous une forme à peine différente, dans un autre blog. Lookingformartin accompagne un roman – dont je laisse découvrir l’auteur(e) – qui m’a beaucoup intéressé pour plusieurs raisons et notamment parce qu’il me semble reposer sur le contraste entre un style vif, aigu, direct et l’histoire comme en creux d’un personnage, Martin, qui peut paraître insupportablement sûr de lui mais qui se décompose, se décontenance, s’évide en permanence. L’auteur(e) ne serait peut-être pas d’accord avec cette manière de lire son roman, mais tant pis !


L’auteur(e) joue d’ailleurs le jeu en proposant aux visiteurs de lookingformartin d’imaginer qu’ils ont un jour rencontré Martin dans des circonstances qu’ils sont libres de choisir. Pour l’instant, seuls ceux qui ont lu le manuscrit du roman (il n’est pas encore publié) sont en mesure de participer à ce jeu, mais j’espère vivement qu’il sera mis en ligne rapidement. Ayant lu le manuscrit, j’avoue m’être laissé prendre au jeu. Notamment, j’ai réagi à (ou contre) un chapitre secondaire de ce texte où il est question du regard jeté par Martin sur une dame nettement plus âgée que lui, nettement mieux posée que lui dans la vie et néammoins fort attirée par lui. Je n’aime tellement pas ce genre de regards que j’ai voulu faire comprendre à Martin mon indignation intérieure, sûr qu’il peut la comprendre, en écrivant cette nouvelle !

***

Autour de la blogosphère

M.B-L n’était pas satisfaite d’elle-même. Et elle trouvait que ça lui arrivait plus souvent qu’à son tour, quoique bien des personnes de son entourage eussent volontiers détesté sa suffisance. C’est du moins un défaut qu’on lui attribuait souvent. Pourtant, une fois de plus, M.B-L n’était pas satisfaite d’elle-même.

M point B tiret L : M.B-L affectait de s’irriter contre cette appellation qu’elle avait d’ailleurs fini par adopter, même quand elle se parlait à elle-même, mais qui lui paraissait trop marquée par son milieu. Il y avait déjà NKM, BHL, DSK, pourquoi pas MBL. Non ! M.B-L ! Certes, elle ne détestait pas qu’au fond de sa province, la presse locale assimile la bourgeoisie de la petite ville, ou du moins ses éléments les plus remarquables, aux « bobos » de Paris, mais plus bobo en cela qu’elle ne le pensait, elle tançait souvent son entourage quand il singeait d’un peu près les manies attribuées à cette classe que tout le monde déteste. D’ailleurs pour montrer sa différence, elle ne votait pas à gauche, mais plutôt à droite. Et parfois, à la gauche de la gauche ! Une partie de sa réputation (enviable) de suffisance venait d’ailleurs de là.

Mais, cette fois, elle n’était vraiment pas satisfaite d’elle-même. Bon, déjà, son entreprise, un peu éhontée, pour séduire Martin, le jeune gaillard du parking, avait échoué pour l’instant, mais ce n’était pas le plus grave. Elle avait bien d’autres moyens pour vérifier la réalité charnelle de son existence au près des hommes et puis l’échec était sans doute provisoire. Non : ce qui la gênait le plus dans cette histoire, c’est qu’elle avait poussé la conscience professionnelle jusqu’à demander au bon Google de chercher du côté de ses moteurs ce que donnerait « Martin+parking+X », avec les guillemets. Par décence, nous désignons par X*** la petite ville dont il est question ici. Et elle était arrivée ainsi sur un blog d’écrivain très centré sur Martin. Et ce qu’elle y avait trouvé ne lui plaisait pas du tout.

D’abord, le blog ne permettait pas de distinguer nettement Martin et l’auteur et M.B-L avait l’impression en en feuilletant les pages que Martin était sans doute un simple personnage de roman. Certes, il paraissait devoir en être le héros, comme on dit, mais le roman n’était même pas encore publié et il est assez humiliant pour une femme d’âge de s’escrimer (en vain!) à séduire un gigolo de papier. D’autant que le site jouait à inviter les visiteurs à chercher s’ils n’avaient pas un jour croisé le chemin de Martin. Or, justement, une visiteuse affirmait avoir entrevu le mec et le trouver plutôt sympa, sauf sur un point : elle n’aimait pas, mais alors pas du tout, la manière dont Martin se comportait avec Madame Mireille Bertin-Lachaut ! M.B-L avait sursauté. Et attendu avec une impatience adolescente la prochaine livraison du blog.

Et cette fois, elle avait été servie ! Pas moins de deux billets avaient été postés depuis son dernier passage. Dans l’un, la visiteuse usurpait son identité pour feindre d’envoyer à l’auteur une mise au point que M.B-L n’aurait jamais écrite ainsi. Dans l’autre, l’auteur répondait à la missive en copiant/collant le chapitre qui, dans le roman, parle de Martin et de Mireille Bertin-Lachaut ! (voir là) Le pire, c’était que ce chapitre est écrit avec des précisions toutes aussi inexactes les unes que les autres mais toutes aussi plausibles les unes que les autres. M.B-L n’ignorait pas que dans un roman le plausible suffit à garantir l’effet de réel. D’ailleurs, lisant ce texte, n’avait-elle pas eu envie de vraiment gifler Martin ? Il est vrai qu’en même temps, mais cela allait dans le même sens, elle avait atténué le coup pour mieux sentir sur ses doigts la barbe naissante du malotru.

On le reconnaîtra : il y avait là de quoi ne pas être satisfaite de soi. Les noms d’oiseaux volèrent bas dans son for intérieur. Elle s’exaspéra d’autant plus qu’ils s’adressaient autant à Martin qu’au gestionnaire du parking, autant à l’auteur – qu’elle commença même à soupçonner d’être une femme – qu’à sa visiteuse de blog, autant à M.B-L qu’à Mireille Bertin-Lachaut. Elle s’était montré aussi bien trop conne en apportant ses gâteaux/gâteries à ce goujat. Mais l’Auteure (elle lui posa une majuscule pour pouvoir lui coller la marque du féminin à l’arrière!) n’avait pas non plus jouer franc-jeu en lui taxant ses nom et prénom et en la transformant en parangon des vices de la bourgeoisie locale. Cette pouffe allait même jusqu’à se déguiser mal derrière une bête visiteuse. Si sotte que ça, la visiteuse ?

L’accès de mélancolie dura au moins quelques minutes: le temps qu’il lui fallut pour se rendre compte que la situation n’était sans doute pas aussi inextricable (elle dit bien « inextricable » et ce mot faillit bien la faire redémarrer dans le désarroi), pas aussi inextricable qu’elle l’avait cru. Car enfin il y avait dans le billet laissé par la fausse visiteuse des remarques sur lesquelles M.B-L pourrait s’appuyer pour une contre-attaque. Ah, on voulait, sous prétexte de littérature, la dénigrer en tant que représentante de la bourgeoisie locale, en faire une mal baisée mal baisant rendue hors d’usage par l’âge et la richesse ! Et bien, on allait voir ce qu’on allait voir ! Et d’abord, le Martin, elle allait se le mettre dans son lit.

*

Un petit chat qu’on appelait Mitsou.

En remplaçant une passion par une autre, l’évocation acheva de la calmer. Même si sa rêverie ne parvenait pas à choisir entre plusieurs scènes possibles (plausibles!) : on y voyait notamment un gestionnaire de parking paralysé par l’élégance si présente dans la chambre de M.B-L (qu’elle partageait d’ailleurs avec son vieux mari) et le même gestionnaire, tout aussi décontenancé, mais cette fois par le contraste entre le bordel de la pièce où il posait son grabat et l’aspect aimablement bien rangé des dessous de la dame, M.B-L appréciait la confusion entre les deux situations. Son âge (justement!) lui avait au moins appris que le désir et surtout le plaisir se meuvent à l’aise dans ce genre de confusions. Mais – conservant en elle comme un reliquat de sa colère précédente – elle sut veiller à ce que cette aise aussi plausible que réelle ne lui fît pas oublier sa volonté de vengeance.

Ah, mon bonhomme, tu as voulu m’humilier en refusant mes avances, et bien tu vas voir ce que tu vas voir ! Et M.B-L de se mettre à décrire avec force précisions, toutes aussi exagérées les uns que les autres et surtout toutes, ou pratiquement toutes, censurées par le respect humain que son éducation lui avait inculqué, malgré qu’elle en eût eu, les effets physiologiques visibles de la décontenance de son amant. Il se voulait conquérant balzacien, il aurait un fiasco stendhalien ! Ce qui ne l’empêcha pas d’avoir soudain et fort l’envie de pleurer.

M.B-L n’était point femme à se retenir de pleurer, ni de quoi que ce soit, quand elle en avait fort envie. Elle pleura sans larmes : elle n’ignorait pas qu’ainsi le visage et son regard durcissent et qu’il se passe alors ce qui se passe souvent pendant l’amour, quand ne subsiste que le masque exténué de l’attention la plus extrême à l’instant vécu. Qui l’aurait aperçue ainsi n’eût pas manqué de se sentir minuscule et de se taire. Mais elle était seule.

Elle se ressaisit alors, c’est-à-dire qu’elle en revint à une habitude ancienne qui avait fait ses preuves. Elle s’offrit un retour en arrière des plus classiques. Elle savait bien que revoir sa vie est impossible et sans doute parce qu’on ne peut pas revoir ce qu’on n’a jamais vu, mais il lui était souvent arrivé de constater qu’en inventant tel ou tel événement sur son passé, elle y trouvait matière à croire oublier le présent, même si l’événement évoqué n’était pas joli-joli, comme elle disait. Elle se mit à rêver à Mitsou, un des premiers petits chats qu’elle eût jamais. Pour oublier Martin et son blog, elle crut bon, la pauvre, de penser à un chaton !

M.B-L s’imagina qu’à douze-treize ans, ses parents lui avaient offert Mitsou sans doute à l’occasion d’un gros chagrin dont, présentement, elle se souciait comme de l’an Quarante. Certes, elle ne pouvait pas douter avoir eu un jour (et même, ricana-t-elle, plusieurs jours) douze-treize ans, ni avoir reçu un chat ou un chien en cadeau de consolation, mais elle n’ignorait pas (et elle s’en contre-fichait) que ce chat pouvait très bien ne s’être jamais appelé Mitsou.


Mitsou avait donc été un petit animal tout noir, aux yeux si brillants qu’on ne pouvait douter de son inconvenance. Pour la famille de la future M.B-L et pour l’éducation qu’elle avait imposée à la fillette, briller des yeux relevait nécessairement de l’inconvenance, comme écarter les coudes à table et les genoux à chaise. Mitsou avait maintes fois permis de vérifier l’exactitude de ces mises en garde, bien qu’on fût déjà dans les « Sixtees ». Il griffait de partout et partout. Rien ne lui résistait : ni les meubles dont il se refusait à reconnaître le style, ni le cuir des canapés qu’il traitait comme du skaï, ni les genoux, même serrés, de sa maîtresse aux parents de laquelle il offrait, apparemment sans le savoir, un prétexte pour refuser le raccourcissement des jupes et même des robes. À un demi-siècle d’intervalle ou presque, M.B-L s’imagina qu’elle s’était imaginé que Mitsou était responsable du caractère insupportablement sage des vêtures choisies par sa mère !

En fait, elle n’avait jamais douté que ce fût encore un coup de la démocratie-chrétienne, fort prisée par la famille. La petite ville de X***, comme ses campagnes environnantes, a finalement accepté la République assez tôt dans le siècle XIX, à la condition que celle-ci accepte de son côté la main-mise culturelle et foncière de l’Église sur la région. Les Lachaut avaient eu un aïeul député et plusieurs de leurs ancêtres avaient été maires ici et là, tout en développant, de façon que la tradition familiale considérait comme intelligente, l’entreprise de marrons glacés créée par le député. D’ailleurs, la confiserie que son mari lui avait achetée permettait encore à M.B-L d’exhiber sur certains desserts la manchette « existe depuis 1878″. Bien avant Mitsou.

Cependant, il faut reconnaître à la famille Lachaut (en tout cas, personne ne manquait de le signaler) que les gestionnaires de l’entreprise de marrons glacés avaient toujours su associer leurs employés, même quand ils commencèrent à se syndiquer, aux bénéfices de leur réussite : salaires légèrement supérieurs à la moyenne locale (il est vrai particulièrement basse), salle de réunion pour l’aumônerie, cadeaux pour les enfants lors des fêtes liturgiques et même, parfois, une bourse pour donner de l’instruction aux plus méritants. C’est sans doute cette tradition sociale et chrétienne qui avait permis aux marrons glacés d’échapper aux grèves du Front Populaire.

Bien que la documentation se montre fort peu prolixe sur ce point et cette époque, il semble que l’entreprise et la famille traversèrent le second conflit mondial sans vraiment choisir entre résistance et collaboration. Mais le père de la future M.B-L se retrouva ensuite à la tête d’une section d’un parti aujourd’hui bien oublié et qui s’intitulait bravement le mouvement républicain populaire. Quand Mitsou et ses inconvenances furent offerts à Mireille Lachaut, le mouvement républicain populaire existait encore et le père de notre héroïne tenait toujours à ce qu’il gardât son indépendance (bienveillante) par rapport à de Gaulle.


On le voit sans doute : évoquer Mitsou avait permis à M.B-L d’oublier Martin sans vraiment l’oublier. Sans vraiment l’oublier, car le paysage socialement lisse qu’en bonne Lachaut M.B-L se représentait bien partagé entre la haute bourgeoisie locale et le reste de la société vivant en bonne intelligence durant les temps bénis d’avant les « Sixtees », ce paysage était frôlé de près par des silhouettes intruses, inquiétantes, aussi irréelles que les liens imaginaires de bénévolence et de gentillesse qui le constituaient. Silhouettes de la lutte des classes, mal rasées, musculeuses, parfois avinées, lourdement soviétiques, elles évoquaient, par pillage et viol, la fin d’un monde. Et, gonné comme l’as de pique, souvent farouche et sûr de lui, le Martin du parking les rameutait sur les devants de conscience. D’urgence, il fallait en revenir à Mitsou.


La gaminette de douze/treize ans en avait eu vite assez de ce chat devenu adulte et qui ajoutait de nouvelles inconvenances aux anciennes. D’autant que sa mère lui reprochait de mal s’en occuper. Aussi, un jour, fut-il décidé de le porter chez le vétérinaire, un ami de la famille, pour une castration vite fait bien fait, comme on eût aimé, sans se l’avouer même au confessionnal, qu’y passassent aussi les prolétaires récalcitrants. Or, Mitsou se révéla beaucoup plus anarchiste que marxiste et, dans la salle d’attente, où la mère et la fille passèrent pourtant avant les autres clients, au lieu de haranguer la faune du lieu pour qu’elle se donnât la main, il sauta de son panier et prit la porte. On n’entendit plus jamais parler de lui. Bon débarras.

*

Un beau mariage.

Mais elle ne parvint pas à se débarrasser comme ça de Martin et surtout du blog de son Auteure. Oui, décidément c’était une femme. Certes, dans un billet, celle-ci avouait son genre, mais à la première lecture, M.B-L y avait vu une entourloupe supplémentaire de l’auteur. D’autant qu’un échange entre un faux visiteur et l’écrivain sur la naissance de Martin, avec digression inattendue sur l’accouchement, lui avait paru plus que suspect. Maintenant, elle se convainquait que l’écrivain était bien une femme.

Elle relut le billet qui avait pour titre « Chère madame Bertin-Lachaut » : oui, seule une femme… Mais elle se reprit: qu’en savait-elle après tout? M.B-L croyait avoir découvert, l’expérience aidant, donc au fil déjà long des années, qu’il n’y a pas plus de psychologie féminine que de psychologie masculine. Nous lui laisserons la responsabilité de cette conviction, même quand elle la généralisait à l’ensemble des groupes, classes, races, nations, territoires dans lesquels il est d’usage d’enfermer les individus, même les plus inqualifiables d’entre eux. « Une personne reste une personne » disait-elle souvent  » et il est criminel de la juger sur la classe à laquelle elle semble appartenir, sur le faciès qu’elle semble porter, sur son passeport… ». C’est sur de telles assertions que s’était établie sa réputation de suffisance.

Elle était quand même convaincue que l’auteur du roman était une auteure. Et pas seulement parce qu’elle affichait son genre. Voilà qui eût pu en dire long sur sa propre personne, si seulement elle avait tendu l’oreille !

Il est vrai que la dite Auteure s’enferrait dans ce dernier billet, allant jusqu’à mettre en doute certaines affirmations qu’elle lui avaient attribuées en rédigeant – à la place de la prétendue signataire ! – l’intervention de Mireille Bertin-Lachaut. Avec une certaine perspicacité, l’Auteure avait fait dire à M.B-L (ou plutôt à son simulacre) que son envie de mettre le jeune Martin dans son lit n’était pas la conséquence de ses déceptions conjugales. Mais dans la réplique qu’elle avait ensuite placée dans le blog, elle s’était permis de persifler sur ces dernières. Et là, M.B-L voulait réagir.

Elle n’ignorait pas qu’il est de bon ton, quand on conteste l’ordre établi, d’affirmer que les liens du mariage en milieu « bourge » sont dépourvus de toute richesse charnelle. Elle n’ignorait pas non plus, et pour cause, que l’éducation démocrate-chrétienne a longtemps essayé de réduire le sexe à la portion congrue. Elle pensait, elle aussi, que beaucoup des bourgeoises de son entourage rêvaient, rêvaient au moins, de compenser par quelques extras la médiocrité du quotidien. Elle avait même cru longtemps qu’au delà de la soixantaine, il est rare que le déduit – surtout conjugal – conserve un quelconque intérêt. Quand elle avait été en âge de vérifier, elle avait pu constater qu’elle s’était trompée.

Elle s’était mariée, très jeune et dans des circonstances qui avaient un peu défrayé la chronique locale, à une époque où la morale démocrate-chrétienne paraissait mise à mal par l’air du temps. Elle était alors en Terminale Lettre du Lycée de L’Immaculée-Conception et avait été élue par ses condisciples pour les représenter au Conseil d’Administration de cet établissement privé. Bien entendu, les trois ou quatre délégués des élèves n’avaient pas vraiment droit au chapitre, mais ils siégeaient vraiment autour de la même table que les représentants du personnel, de ceux de l’administration, des parents d’élèves et surtout de la Mairie. C’est ainsi que Mlle Lachaut était assise aux côtés de M.Bertin, un trentenaire sémillant, bon causeur et qui s’amusait beaucoup à scandaliser les plus réactionnaires. Il avait ainsi proposé, sans insister, que la prière du matin fût remplacée par une minute de silence, que les tabliers roses des filles fussent plus multicolorés et légèrement raccourcis, que l’Histoire Contemporaine tînt enfin compte de la période qui avait suivi la Grande Guerre.

Sa voisine avait à chaque fois voté en faveur de ces propositions avec un enthousiasme juvénile qui n’avait certes pas emporté la conviction de la majorité du Conseil, mais lui avait attiré, à la sortie de la dernière réunion, juste avant le bac, une demande en mariage qu’elle avait acceptée de transmettre à ses parents. C’est ainsi que Mireille Lachaut, fille unique du confiseur bien connu, convola en noces justes avec Monsieur Bertin, du barreau de Y*** Ils avaient engendré, dans des délais raisonnables, un garçon et une fille, avant que le temps et les quinze ans de différence d’âge entre M.B-L et son époux ne déliassent quelque peu ce couple.

Mais M.B-L, agacée par le sourire sarcastique (ben, voyons!) qu’elle attribuait à Martin, ajoutait aussitôt que les libertés qu’ils prirent assez vite avec la morale démocrate-chrétienne n’empêchaient pas « et peut-être, au contraire » l’entente conjugale, notamment en matière de galipettes. Quand Bertin, septuagénaire avenant, riche, soigné, attentif avait ajouté à cette kyrielle d’épithètes une impuissance certaine, M.B-L sut inventer avec lui des jeux si efficaces que la tendresse s’ensuivit. N’en déplaise à l’Auteure et à son Martin.

M.B-L n’était pas mécontente de son retour en arrière. Comme presque toujours, le subterfuge lui avait permis de laisser à sa colère de la bride pour se calmer. Elle se calma donc. Se calmer présentait malgré tout un inconvénient de taille : se calmant, elle se retrouva devant la nécessité de trouver un stratagème pour s’envoyer le Martin.

*


Sociologie de la tartelette.voir aussi ici

Elle ne pouvait pas continuer à échanger avec lui quelques mots, anodins d’un côté, narquois de l’autre, pendant que d’une main, il lui tenait la portière et de l’autre, mais c’était la gauche, il s’apprêtait à mordre avec appétit dans la dernière tartelette qu’elle lui avait apportée. N’en déplût à l’Auteure – qui exagérait vraiment sur ce sujet dans le chapitre copié/collé – Martin appréciait une friandise qui reposait sur près de 130 années de conscience professionnelle. L’Auteure avait même poussé la perversité jusqu’à reproduire, pour illustrer le billet où elle feignait de répondre à Madame Bertin-Lachaut, la photographie d’une pâtisserie assez infâme par sa couleur (un mélange de lilas et de bruns à vomir) , sa forme (assez proche des cadeaux canins qui déshonorent les trottoirs de X*** ) et surtout ses petites dragées mauves en forme de cœur. Et ça, elle ne l’emporterait pas au paradis.

tartelette


Quelques jours plus tard, M;B-L décida qu’aujourd’hui, elle ne prendrait pas la voiture. Et elle se rendit au café « Les Lucioles » où elle savait que Martin avait ses habitudes. C’est Paul, l’unique serveur qui le lui avait dit. Le parking et le café sont assez proches l’un de l’autre, mais M.B-L n’avait plus l’habitude de traverser sa ville à pied, et elle fut un peu décontenancée par ce qu’elle en aperçut.


Les quelques commerces ancestraux qui exposaient encore leurs vieilleries mercières, chapelières, voire alimentaires, il y avait quelques années, avaient été remplacés par des boutiques de fringues et surtout des agences bancaires. Les trottoirs avaient été refaits à neuf et même élargis dans la zone semi-piétonnière. C’était agréable à première vue et cela sonnait plutôt moderne. D’ailleurs, comme à Paris ou à Y***, les piétons semblaient manier le téléphone mobile avec une maestria certaine, à peine encombrée par quelque réticence venue du fond provincial des âges et de l’intimité. Elle fut quand même surprise, et agréablement, par la multiplication des vieillards – grâce à une mise soignée, c’est avec dignité qu’ils titubaient sans déambulateur – mais aussi des Arabes que les rues semblaient avoir adoptés plutôt facilement. M.B-L se sentit très jeune, bien qu’elle eût sans doute à peu près le même âge que les chibanis maghrébins dont elle contournait les groupes. De façon assez idiote (si l’on pouvait en croire les épithètes qu’elle s’adressa), elle sentit que Martin eût approuvé son aisance dans ce quartier populaire de cette ville bourgeoise.

Elle ne connaissait pas vraiment Paul, le serveur des « Lucioles », mais la seule fois où elle s’était assise à la terrasse, il n’avait pas pu s’empêcher de nouer la conversation, sans se gêner pour la regarder droit dans les yeux et sur la bouche. Elle lui avait avoué, sans y attacher d’importance, qu’elle ne connaissait plus de la ville que le parking et son préposé. « Ah ! Martin ! » avait-il soupiré, plaçant un point d’exclamation là où plusieurs points d’interrogation eussent été nécessaires. Oui, elle croyait qu’il s’appelait Martin. C’est ainsi qu’elle avait appris que Martin venait souvent aux « Lucioles ».Si elle s’y rendait aujourd’hui, c’est qu’elle voulait essayer d’en apprendre un peu plus sur les habitudes du préposé.

Paul se précipita vers elle, tout en rectifiant vite son profil dans le reflet d’une vitre. Le commercial parfait qu’il savait être en même temps que Don Juan d’arrière-boutique prit la commande et lui laissa l’initiative. Elle ne pouvait venir que pour lui, cette Mireille Bertin-Lachaut. Quand il revint avec la menthe-à-l’eau que la douceur du temps rendait appréciable, il lui montra qu’il l’avait doublement reconnue, en la remerciant d’avoir quitté un instant son salon de thé pour sa modeste terrasse et en lui précisant que Martin ne venait jamais à cette heure. Il sut même cacher sa déception ( se dit-elle avec une certaine fatuité que l’Auteure aurait peut-être dite « de classe ») quand elle chercha à lui faire préciser quel était le moment le plus favorable pour rencontrer Martin. Pour l’aider à surmonter son dépit (et donner de la réalité à celui-ci) M.B-L se fit même très Mireille Bertin-Lachaut en le félicitant pour les aménagements de sa terrasse et en ajoutant que ça lui donnait des idées pour le salon de thé. Elle fit si bien, d’ailleurs, que Paul crut voir son heure arriver.

M.L-B ne détestait pas les hommages masculins, surtout quand ils n’engagent à rien. Semblable en cela à bien des femmes, elle ignorait, elle ne voulait pas savoir, que beaucoup de mâles sont plus féminins qu’on ne pense et que ne s’engager à rien vis-à-vis de l’un d’eux peut blesser en lui telle ou telle intimité dont il ne soupçonnait pas l’existence. Fût-ce le cas pour Paul ? M.B-L – on ne le sait que trop – n’avait lu du roman dont Martin était le héros que le chapitre mis en ligne par l’Auteure et croyait deviner que le serveur était encore plus accessoire que la confiseuse pour Martin. Ce qui était probablement faux. Mais au regard de qui ?

Il n’osa pas s’asseoir à côté d’elle et elle se dit, bien sûr, qu’il préférait sans doute rester debout pour plonger plus facilement du regard dans un décolleté un peu imprudent. Elle put d’ailleurs constater que son chemisier de style n’allait pas dans ce sens et elle refusa de se laisser offrir une seconde menthe-à-l’eau. Retrouvant sans y prendre garde la suffisance que lui reprochait son entourage, M.B-L se leva assez brusquement en disant, mon dieu, mon dieu, j’oubliais que ma manucure doit m’attendre chez moi. Et ciao, Paolo.

Elle avait eu le renseignement espéré et pouvait donc peaufiner son stratagème.

*

Ceci n’est pas une tragédie classique.

M.B-L se serait bien vue arrivant aux « Lucioles » vers 20 heures, alors que Martin est déjà au comptoir à échanger quelques mots avec la barmaid, avant de prendre un guéridon et de se faire servir par Paul. Comme un stratagème envisagé demeure un rêve, il est comme le rêve, le contraire d’une tragédie classique : il ne respecte ni l’unité du temps, ni celle du lieu, ni même celle de l’action.

M.B-L ne s’interdit donc pas de faire le Paul à la fois cligner de l’œil à son adresse pour lui montrer Martin et se servir du même œil, ouvert, fermé, ouvert, deux fois de suite, pour signaler à Martin qu’il avait une visite. Martin hausserait les épaules, mais quand même… Et Paul, de se demander comment il pouvait bien faire pour que les femmes lui tombent dans les bras sans qu’il y accorde de l’importance.

Quant à M.B-L, assez sottement (elle était la première à le reconnaître), elle penserait exciter la jalousie de Martin en offrant à Paul la compensation d’un très léger flirt qu’elle imaginait plutôt flatteur pour le barman. Elle lui confie donc (ou lui confierait, ou lui avait confié donc) qu’elle s’ennuyait trop fort chez elle pour y rester et que leurs échanges de l’après-midi l’avaient conduite à penser aux « Lucioles ».

Dans cette version des faits, M.B-L n’alla pas plus loin et elle ne sut jamais ce que Paul lui avait alors répliqué. En revanche, elle se souvint plus tard que Martin s’était assez brusquement levé (brusquement, pour satisfaire l’amour-propre de M.B-L, mais pas trop brusquement, pour respecter l’image que l’Auteure se fait de son Martin) pour se diriger vers Paul et sa cliente. Quoique son côté midinette eût envisagé sérieusement une algarade entre les deux copains, elle n’alla pas plus loin dans cette voie et se contenta de deux variantes conduites parallèlement.

Première variante : Martin, sûr de lui et de son charme (Mireille Bertin-Lachaut s’en laisse chavirer l’émotion), la salue bien bas (un peu trop), expédie Paul au reste de sa clientèle, plutôt nombreuse à ce moment, et lui demande s’il peut s’asseoir à sa table. Bien entendu, d’accord avec l’Auteure, elle n’a pas le temps de lui répondre et il s’assied d’autorité. Il leur commande deux demis (« et un entier, un ! » annonce Paul) et lui fait remarquer qu’il la préfère sans tartelette à la main. Bien entendu, elle ne sait pas ce qu’elle réplique, mais elle réplique, c’est sûr, et de manière telle qu’elle devrait montrer au malotrus qu’elle a plus d’esprit qu’il ne le croit. Le malotrus étant un malotrus ne comprend pas sa finesse. Elle non plus d’ailleurs et cela met fin à la première variante.

Deuxième variante : Martin, sûr de lui et de son charme (Mireille Bertin-Lachaut s’en laisse chavirer l’émotion bien que M.B-L lui conseille de faire gaffe), la salue vaguement (un peu trop vaguement) et passe devant elle (devant eux!) et sort de la terrasse. Alors, n’écoutant que son courage, et oubliant au passage de consommer la menthe-à-l’eau que Paul tiendrait, bien entendu, à sa disposition, elle emboîte le pas au fuyard. Qui accélère.

Bien que cette accélération confère (oui, c’est le mot que M.B-L utiliserait!) à sa silhouette l’allure un peu piteuse, surtout vue de dos, de quelqu’un qui commence à douter d’avoir fait le bon choix, elle trouve que son charme n’en souffre pas. Un charme un peu penaud (dans le jean éternel, le mâle fessier se réduit à presque rien), mais que Mireille Bertin-Lachaut considère – malgré qu’en ait M.B-L – avec un attendrissement quasi maternel. Elle pourrait le rattraper, mais elle se retient et c’est lui qui s’arrête brusquement : non, elle ne le heurte pas, elle est midinette, mais quand même… S’arrêterait brusquement et lui demanderait (non : il ne lui demanderait pas pourquoi elle le harcèle ainsi) et lui demanderait si elle ne trouve pas que Paul est obsédé par les femmes. Dans sa situation, c’est difficile pour elle de trouver une réponse élégante et M.B-L se tient coite.

Martin prend donc Mireille Bertin-Lachaut par le bras :il serre et lui fait un peu mal, mais elle préfère car ainsi, se dit-elle, il sent moins la fonte musculaire qui la tracasse depuis quelques temps. Elle se laisserait guider par lui. Jusqu’à l’immeuble où il a son studio : elle n’imagine pas Martin autrement qu’en célibataire, mais maintenant, elle se pose la question. Ne la tranchant pas (car elle manque de temps), elle abandonne l’idée du studio pour un petit appartement, un F2 par exemple, qu’elle situe à l’étage d’un de ces petits immeubles crépis de gris du quartier de la Poste.

Ils sont maintenant chez lui. « Dans mon bordel », lui fait-elle dire. Et elle se fait répondre qu’elle ne peut pas lui répliquer que c’est au contraire tout à fait coquet, car c’est vrai, il est difficile de trouver un endroit pour s’asseoir. La logique du moment voudrait que Martin débarrasse un coin de son grabat pour lui faire un peu de place. Mais cet enchaînement se heurte en M.B-L à l’idéologie démocrate-chrétienne revue et corrigée début siècle XXI et comme elle n’a pas plus à respecter la concordance des temps que celle des lieux, c’est dans sa villa des Hauts de Ville que Mireille Bertin-Lachaut invite Martin à pénétrer. C’est d’ailleurs une bonne idée car elle sent aussitôt la prise de la poigne de Martin sur son bras se desserrer nettement.

Se rend-il compte de l’élégance des pièces qu’il traverse avant qu’ils n’entrent dans la chambre conjugale ? Madame Bertin-Lachaut ne pose pas la question, pas plus qu’elle ne choisit parmi les réponses possibles. Elle devrait être trop pressée par la situation. Oui mais, oui mais M.B-L se rend alors compte que Martin est bien un personnage de roman. Pas n’importe quel personnage. Et pas n’importe quel roman. Il n’est pas un acteur assez accessoire dans une petite nouvelle de rien du tout, mais le héros et le narrateur d’un roman solide et bien ficelé même s’il se termine sans doute sur des points de suspension.

C’est pourquoi, elle le voit, au moment où la Bertin-Lachaut sent se desserrer l’étreinte sur sa fonte musculaire, se décontenancer soudain. M.B-L invente, bien sûr, cette décontenance, et elle le sait, mais elle éprouve une telle urgence de l’inventer qu’elle perçoit l’effondrement intime de Martin comme une certitude. C’est d’ailleurs beau l’effondrement intime et momentané d’un quadragénaire sûr de lui et un peu bourru et M.B-L serait presque fière de son invention. Honteuse aussi et pour les mêmes mauvaises raisons.

*

Une comédie peut en cacher une autre.

Quelque part ou nulle part, un jeune homme mal rasé et qui plaît aux filles et qui s’en fout s’enfonce un peu derrière son éternelle écharpe et trouble les coordonnées de ceux qu’il croise ou qu’il pourrait croiser. Elle ne peut pas le demander à l’Auteure, mais M.B-L devine que le roman dont Martin est le héros contient aussi l’histoire d’un autre personnage. Homme ou femme, elle ne se décide pas, relation amicale ou amoureuse, elle ne se décide pas : quelqu’un qui serait en creux. Une présence qui réoriente toute la vie de Martin mais comme en absence : un être qui vous manquerait encore, après vous avoir manqué longtemps, comme s’il avait disparu sans que vous sachiez ni pourquoi ni comment.

Et vous êtes là, droite sur vos escarpins, solidement arrimée à votre statut social, disposant grâce à lui des balises, des haubans, des étais, des échafaudages qui vous posent une femme bientôt sexagénaire dans la vie, ou quadragénaire solitaire, à l’inélégance recherchée, dissident sans risque pour personne, jaloux efficace de votre indépendance d’esprit, bougon mais gentiment, gentil mais ironique, affable parfois et distant souvent, et soudain (non ! ce n’est pas brutal, ce n’est pas contondant, ce serait plutôt comme la déchirure sournoise d’une étoffe mouillée), vos certitudes s’évident.

Elles ne s’effondrent pas, ce serait trop beau d’apercevoir à leur place un vide béant circonscrit tel un cratère, non, elles s’affalent de travers, vos évidences, elles glissent, elles dérapent selon des guingois mal fagotés : vous êtes toujours là, debout, Mireille Bertin-Lachaut ou Martin quelque chose, mais vous n’y êtes déjà plus. La présence in abstentiam de celui ou celle qui est en creux, et qui n’existe peut-être pas et qui n’existe peut-être plus, retire de la substance à votre entité. C’est comme si vous aviez appris, non, que vous avez appris, non, que vous êtes, encore une fois, en train d’apprendre qu’un être cher – et dont vous ignoriez jusqu’à maintenant qu’il vous était si cher – vient de se tuer volontairement sans vous laisser d’explication. Cela fuit de partout.

Un ange passe et laisse Mireille Bertin-Lachaut seule dans la chambre. M.B-L veut la voir se baisser pour attraper un de ses escarpins qui a glissé sous le lit conjugal et, se baissant, apercevoir par la baie sur laquelle flotte une mousseline un paysage inattendu. Ce n’est pas un paysage : à la place du paysage attendu -les perspectives paysagères sur l’horizon de falaises et de montagnes – elle zoome sur l’écorce d’un très vieux châtaignier (c’est un frêne mais peu importe, elle a toujours été nulle en botanique, elle a toujours été nulle), d’un très vieux châtaignier dont les déchirures ligneuses prennent allure minérale. Atteinte d’une myopie qu’elle ne se connaissait pas, elle perçoit que son regard se fixe sur une de ces diaclases, grise, grenue.

Il ne s’y fixe pas, il y est happé, c’est un rapt. Quelqu’un alors s’évanouit, s’aperçoit soudain qu’il s’est évanoui, anéanti. Et qu’aussi soudainement, passé de l’autre côté, quelqu’un ou quelque chose, peut-être rien, est le tout. Le tout qui ne bouge pas, qui ne bougera pas, qui n’a jamais bougé. Et quand M.B-L voit Madame Bertin-Lachaut revenir à elle, elle sait qu’elle remplit de sa légère existence l’être-là du monde. C’est le premier matin du monde. Provisoirement.

L’être-là du monde, un escarpin à la main et le teint un peu rosi par l’effort qu’elle vient de faire, se retrouve maintenant en centre-ville, laissant derrière elle les Lucioles, Paul et Martin. Mais pas M.B-L ! Celle-ci rentre au logis, sans passer par la confiserie. À cette heure, la petite ville de X***, comme les autres, a entamé sa sieste nocturne et les talons de Mireille Bertin-Lachaut sonnent fièrement sur les trottoirs déserts. Dans le silence ambiant, les bruits de la journée s’entendent encore un peu et c’est sans doute pourquoi les talons de notre marcheuse résonnent à la manière d’une cloche fêlée dont le son éveille des nostalgies d’automne. On a envie de pleurer. On en est fière. C’est la vie.

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